Il y a actuellement un phénomène qui préoccupe les acteurs de l’industrie du café et qui fait mal aux communautés productrices de café en Amérique du Sud. L’Hemileia Vastatri, la rouille orangée du caféier, a déjà été source de problèmes responsables d’épidémies sévères au Costa Rica en 1989, au Nicaragua en 1995 et en Colombie, de 2008 à 2011. Mais malgré les dégâts causés, la frappe qu’ont vécue les producteurs en 2012 n’avait rien de comparable. Car c’est une véritable épidémie qui sévit depuis 2012, surtout en Amérique centrale. On estime le désastre à une perte de près de 20% des récoltes et les experts estiment que le phénomène pourrait perdurer jusqu’en 2016. Les pertes économiques totales liées à l’épidémie de 2012/13 se chiffrent en centaines de millions de dollars avec des implications sociales difficiles à estimer.
Causée par un champignon, la rouille, Hemileia vastatrix, attaque les feuilles du caféier et peut causer de fortes défoliations, une chute anormale des feuilles. Son histoire est bien connue : elle dévasta dès 1869 toute la caféiculture de Ceylan (aujourd’hui le Sri Lanka).
L’année 2012 a été une année de perturbation climatique liée à un réchauffement de l’océan Pacifique. Ce phénomène est appelé El Niño. (El Niño version moins sérieux ). En Amérique Centrale, cette perturbation se caractérise principalement par une moindre pluviométrie. Une série de facteurs aurait déclenché et aggravé le phénomène en 2012 :
· Faible pluie qui n’a pas permis de nettoyer les spores du champignon des feuilles du caféier ce qui a assuré leur germination;
· Température moyenne plus élevée durant l’année 2012 a diminué la période de latence de la maladie et en a fortement augmenté la férocité. Elle a aussi favorisé les attaques en hautes altitudes, lieu de prédilection des meilleurs arabicas, réputées peu favorable à la maladie en raison des températures plus basses. Les producteurs n’appliquent généralement pas de traitement pour prévenir la rouille dans ces zones. Ils se sont fait prendre et ont dû faire des traitements tardifs qui ont eu plus ou moins d’effet ayant été appliqué trop tard.
· Le vent. Celui-ci a propagé la rouille sur de grandes distances ce qui a causé beaucoup de soucis pour contrôler l’épidémie.
· Lieu de culture. L’emplacement de la plantation a un effet direct sur le développement de la rouille. Plus les plantations sont situées au grand soleil et plus elles sont touchées. Les parcelles situées sous couvert ombragé subissent moins l’impact de la rouille. L’ombrage semble freiner le développement du champignon.
· Évolution du pathogène. Plus difficile à avancer pour l’instant mais plusieurs experts penchent vers ce phénomène plutôt que la conjoncture des conditions climatiques directes. La météo aurait influencé le champignon causant la rouille, le rendant plus agressif, plus adapté aux conditions climatiques extrêmes. L’application continue de fongicides a pu également permettre l’apparition d’une nouvelle souche plus résistante.
C’est l’état l’urgence. L’Organisation internationale du café (ICO) estime à 2,5 millions le nombre de sacs perdus sur la campagne 2012/2013, actuellement en cours. Les pertes pourraient grimper jusqu’à 5 millions de sacs, selon Ricardo Villanueva, président du bureau consultatif du secteur privé à l’ICO. Selon lui, l’Amérique centrale pourrait mettre dix ans à résorber les dommages causés par la rouille.
Plus de 350 000 producteurs de café sont concernés en Amérique centrale, rappelle l’ICO qui a adopté le 8 mars dernier une résolution selon laquelle des mécanismes de coopération et d’assistance devront être déployés entre ses pays membres.
Malgré les conséquences de cette épidémie, la production devrait s’accroître de 4,75 % entre les campagnes 2011/2012 et 2012/2013 selon le département américain de l’Agriculture, à 151,2 millions de sacs.
Et c’est probablement pour cette raison que malgré ce phénomène le prix du café sur le marché boursier n’a pas bronché et est demeuré assez bas depuis 2012.
Le grand perdant de ce phénomène sera surement les producteurs de café certifié biologique. Les producteurs désirant respecter les critères de la certification verront leur plantation attaquée par le phénomène de la rouille ce qui devrait augmenter les pertes et causer une augmentation du prix.
Pour l’instant, ce phénomène ne touche pas les consommateurs, que ce soit au niveau du prix au niveau de la qualité des cafés exportés. On verra dans les prochaines années comment la chaîne de café réagira à ce phénomène.
Pour continuer votre lecture, je vous invite à consulter les textes suivants ou à googler le sujet:
Coffee rust par The American Phytopathological Society
Dany Marquis
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