Lettre à Aliments Québec


Dany Marquis

aliment préparer au québec

Voici une copie de la lettre envoyée à Mme Céline Beaulieu, coordonatrice, certification et conformité chez Aliments Québec avec qui je discute depuis plus d'un an déjà sur la définition des produits chocolats. 

Comme mentionné dans le texte, la popularité de la sous-traitance, ou l'utilisation de produits semi-transformés dans l'industrie alimentaire rendent le travail des certificateurs complexes.  Plusieurs fabricants, pour des raisons de rentabilité, gardent la provenance de leurs ingrédients cachés, tout en profitant de l'étiquette de produits locaux.

Je veux également mentionner la bonne volonté d'Aliments Québec face à mes demandes qui se frottent à une situation plus large qui touche plusieurs domaines à la fois. 

C'est tout un défi de tracer la ligne entre les définitions surtout lorsque certains entreprises font des millions de dollars en s'affichant comme produits québécois quand dans le fond c'est plus ou moins vrai.

Mes objectifs sont:

  • la valorisation de la fabrication de chocolat à partir du cacao;
  • la valorisation des chocolatiers, chefs et artisans qui choisissent des chocolats fabriqués localement;
  • la valorisation de la transformation de type manufacturière pour la création d'emploi ici;
  • la valorisation du travail des producteurs de cacao comme produit noble, de dégustation, produit agricole et d'éloigner le cacao du marché des produits de commodité;
  • l'augmentation de la transparence sur la réelle provenance du chocolat et non seulement de l'origine du cacao.

Voici donc la copie du message envoyé à Aliments Québec:

Bonjour Céline,

Tel que discuté, je te fais parvenir plus de détails sur ma demande d'ajout de sous-catégories pour le chocolat pour la certification ''Aliment préparé au Québec''.

Et non Aliment du Québec.

Et c'est un sujet intéressant, qui touche d'autres secteurs d'entreprise.  D'ailleurs, je suis tombé ce matin sur ce texte de La Presse pour l'industrie du gin.  Seul 1 gin dans tout le Québec entre dans la catégorie 100% québécois.  Les autres sont assemblés d'ingrédients, dont la base principale, provenant d'un peu partout.

Qu'est-ce qu'un spiritueux québecois?

Leur débat est différent de ma demande, car pour le chocolat, je ne veux pas que mon produit soit étiqueté 100% Québec, car ce n'est clairement pas le cas.  

Comme mentionné dans le texte de La Presse avec la citation de Nicolas Duvernois, c'est vraiment pour une question de rentabilité que les entreprises sous-traitent ou s'approvisionnent à l'extérieur.  

Il y a donc un impact sur la rentabilité et un volet monétaire à resserrer les définitions, et je comprends que c’est délicat et que ça demande un certain courage de dire à des entrepreneurs ‘’Non, ton produit n’est pas québécois.’’

Dans le cas du chocolat, c'est un peu la même chose.  C'est plus rentable, car moins d'opération, de machinerie, de personnel sont requis lorsque le chocolatier achète son chocolat déjà prêt.  Par contre, pousser cette logique basée uniquement sur le profit dirige l'industrie à devenir une simple chaîne d'assemblage ou la finalité, la mise en bouteille, la fonte du chocolat et la mise en moule devient la seule expertise du fabricant.  Ensuite, le marketing appuie sur des étiquettes précises pour convaincre les consommateurs que les produits sont locaux, car assemblés localement.

On délaisse alors les emplois manufacturiers, que ce soit la fabrication du chocolat comme on le fait, ou la fabrication d’alcool neutre à d’autres.

Et je crois que les arguments en faveur d'une conservation des définitions très larges des catégories favorisent le flou communiqué au consommateur et permet aux entreprises de sous-traiter au maximum la fabrication tout en conservant l'image d'un fabricant local.

Je vous réitère donc ma demande de créer des sous-catégories différentes dans la section chocolat.

Cette année, et plus que jamais, mon entreprise Chaleur B Chocolat exerce un rôle de leader dans la réappropriation de la fabrication de chocolat au Québec.  Nous sommes maintenant plusieurs fabricants de chocolat qui réaffirment la force du Québec dans la fabrication des produits de confiserie et de chocolat, en partant de la fève de cacao au lieu d’acheter du chocolat déjà fabriqué.  Il ne pousse pas plus de cacao en Belgique qu'au Québec, et pourtant la majorité du chocolat consommé au Québec vient d'Europe.

C’est un nombre significatif d’emplois que nous délaissons en travaillant avec un produit importé qui peut être transformé chez nous. 

Chaleur B a prouvé que nous pouvons faire du chocolat qui rivalise avec les meilleurs fabricants au monde en remportant des reconnaissances internationales. 

Et je considère qu’il est nécessaire, pour plus de transparence pour les consommateurs, de créer une distinction dans la catégorie chocolat. 

Actuellement, dans votre système de classification, il n'y a aucune distinction entre les chocolats fabriqués à partir de la fève de cacao et les chocolats achetés en pastilles, fondus, parfois aromatisés et réétiquettés.  

Par exemple, une compagnie qui fait fondre des pastilles de chocolat pour les mettre dans des boîtes de conserve ou pour mouler des tablettes de chocolat est dans la même catégorie que celles qui importent les fèves de cacao et fabriquent réellement le chocolat.  Avec la pose de l'étiquette sur son produit, le chocolatier, sans identifier la provenance et le nom du fabricant du chocolat, a créé, selon moi, de la confusion chez le consommateur en mettant les entreprises dans la même catégorie.

Dans les 27 pages de produits chocolat sur le site de Aliments Québec, il n'y a, à ma connaissance, que Chaleur B Chocolat qui est un fabricant de chocolat à partir de la fève de cacao (SCIAN 31132).  Les autres sont des chocolatiers traditionnels qui travaillent à partir de chocolat acheté (SCIAN 31133).

 Selon la classification SCIAN (Système de classification des industries) il y a principalement 2 différents types d'entreprises touchant aux chocolats, et cette distinction est très importante.

 https://www.ic.gc.ca/app/scr/app/cis/summary-sommaire/31132  

 Fabrication de chocolat et de confiseries à partir de fèves de cacao - 31132

Fabrication de confiseries à partir de chocolat acheté - 31133

Ce qui est dérangeant, c'est que je sais que la majorité des chocolatiers achètent des chocolats fabriqués en Belgique, France, Allemagne.  Et si on peut discuter sur la définition et la ligne à tracer pour définir un produit fait au Québec lorsqu’il y a un minimum de transformation, je crois qu’on doit créer des sous-catégories pour identifier leur différence.

On retrouve même sur le site d’Aliments Québec des sacs de pastilles de Vahlrona (France) ou Barry (Belgique ou on ne sait trop), tout simplement réemballées telles quelles, et identifiées au nom du chocolatier comme un produit du Québec.

C'est le produit brut du fabricant de chocolat français Vahlrona qu'ils ont simplement emballé tel quel, sans aucune transformation que de mettre les pastilles dans un sac...

Vous comprendrez qu’acheter des pastilles de chocolat fabriquées en France, les réemballer dans un sac avec un logo et que ce produit soit représenté comme produit trasnformer au Québec est gênant.  Même si on pourrait dire que mettre un produit dans un sac est une étape de transformation.

De plus, en tant que fabricants de chocolat, nous sommes principalement un fournisseur pour les chocolatiers.

Par exemple, la chocolaterie Mathilde Fays utilise nos chocolats dans ses créations.  La chocolaterie État de Choc utilise presque exclusivement des chocolats fabriqués au Québec.

Les deux utilisent aussi des chocolats importés, selon leur besoin et assemblage de profil aromatique.  Toutefois, ces deux entreprises indiquent clairement sur leur emballage la provenance et le fabricant du chocolat.  Ils sont de beaux cas de transparence et d’expertise.  Ils n'indiquent pas seulement la provenance du cacao et le %, exemple: Tanzanie 79%, mais également qui est le fabricant de chocolat.

Et dans leur cas, leurs produits sont dans des sous-catégories différentes.

Bref ma demande est d'ajouter une autre sous-catégorie lorsqu’on clique sur ‘’Confiseries et produits sucrés’’ pour différencier les chocolats, un peu comme la classification SCIAN le fait clairement.

J'ajouterais également une distinction entre les produits chocolat faits à partir de chocolat importé et celui de chocolat fabriqué au Québec, comme les chocolateries mentionnées ci-dessus le font si bien.

 Ce qui ressemblerait à ceci:

  1. Confiseries et produits sucrés
    1. Chocolats  
      1. Fabricant de chocolat à partir de fèves de cacao
      2. Confection chocolat québécois
      3. Confection chocolat d’importation
  1. Confiseries
  2. Confitures, gelées, marmelades et tartinades
  3. Produits du miel et de l’érable

Vous faites déjà des distinctions dans plusieurs produits, avec des différentiations plus claires.  Ce sont d’autres contextes, mais on précise mieux les sous-catégories.

Par exemple: 

  1. Poissons
    1. D'élevage
    2. Sauvages

ou celui-ci:

  1. Fruits et légumes
    1. Conserves et surgelés
    2. Frais
    3. Séchés et déshydratés 

De cette façon, on encouragerait le développement du volet manufacturier et les fabricants de chocolats comme nous et on encouragerait l'utilisation du chocolat fabriqué au Québec par les chocolatiers comme le fait Mathilde Fays et État de Choc pour ne nommer que ceux-là.

Également, c'est une façon d'éduquer les consommateurs à poser des questions sur la provenance du chocolat qui est souvent très caché, et peu éthique.

Encore ici, pas seulement l'origine du cacao et le %, mais à quel endroit le cacao a été torréfié, concassé, vanné, raffiné, conché, etc bref qui est le fabricant du chocolat.

Il est aussi facilement démontrable que la création d'emploi en sera beaucoup plus stimulée que si l'industrie du chocolat continue à s'approvisionner presque exclusivement en Europe.

Ce serait aussi une belle ouverture pour donner un coup de pouce pour les autres fabricants de chocolat.

Chaleur B Chocolat est un leader dans la réappropriation de la transformation de chocolat au Québec.  Je le répète, il ne pousse pas plus de cacao en Belgique qu'au Québec, et pourtant la majorité du chocolat consommé au Québec vient d'Europe.

Pourquoi laisser cette industrie aux Européens?  Nous avons tout ce qu'il faut ici pour le faire, en plus d'éviter au cacao du transport outre atlantique inutile, surtout lorsque le cacao vient des Amériques.

En 2020, nous ferons des efforts considérables pour que les consommateurs reconnaissent la provenance de la fabrication.  Nous serons d’ailleurs au SIAL comme exposant en avril prochain avec un kiosque pour présenter nos collections de chocolat disponibles pour les chefs et artisans.

De votre côté, et sans connaître les rouages de votre organisation, je crois que l’ajout de sous-catégories dans le volet ‘’Aliment préparé au Québec’’ est quelque chose qui ne touche pas aux définitions de vos deux grands volets et qui n’empêchera pas vos membres actuels de rester membres.

Une reconnaissance dans la distinction de l’origine du chocolat amènera plus de transparence et donnera un coup de pouce à l’industrie de la fabrication ici.

Je vous invite à me contacter si vous voulez en discuter.

Cordialement,

Dany Marquis

 --

Brûlerie du Quai / Chaleur B Chocolat

200 rte du Quai

Carleton-sur-Mer, Qc

G0C 1J0

1-866-525-2027

 

 


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