L’amertume : une exploration en profondeur

L’amertume : une exploration en profondeur

May 29, 2025Marie-claire marquis

L’amertume est souvent la première saveur qu’on associe au café. Pour certains, elle est désagréable; pour d’autres, elle fait partie du plaisir.

Mais d’où vient cette amertume? Est-elle naturelle, souhaitée, ou simplement le résultat d’un mauvais café? Dans ce blogue, on plonge dans la chimie du café, les étapes de transformation et les facteurs sensoriels qui expliquent pourquoi votre tasse peut parfois vous laisser un goût amer… ou savoureux.

L’amertume : une question de biologie et d’évolution

Avant de parler de café, il faut comprendre ce qu’est l’amertume. Sur le plan biologique, l’amertume est un goût perçu comme un signal d’alerte par notre système gustatif. Historiquement, il nous aidait à détecter certaines substances toxiques, souvent amères dans la nature (alcaloïdes, tanins, etc.).

Dans le cas du café, cette amertume n’est pas toxique, mais elle est bel et bien liée à des molécules spécifiques naturellement présentes dans les grains de café ou créées pendant leur torréfaction.


Les composés responsables de l’amertume

01  La caféine

C’est l’alcaloïde le plus connu du café, et il contribue légèrement à son amertume. Mais contrairement à ce que l’on croit souvent, la caféine n’est pas la principale responsable du goût amer dans une tasse de café.

02  Les chlorogénates (et leurs dérivés)

Les véritables coupables sont des molécules appelées acides chlorogéniques (ACG). Lors de la torréfaction, ces ACG se dégradent et forment :

a) des lactones (légèrement amères)
b) des phénylindanes (très amers)

Plus la torréfaction est foncée, plus ces composés sont présents… et plus le café devient amer.

03  Les produits de Maillard

Le café est aussi riche en produits issus de la réaction de Maillard, un processus chimique entre les sucres et les acides aminés pendant la torréfaction. Cette réaction donne des arômes grillés, mais aussi certains composés amers.

Torréfaction : l’amertume se construit à chaud

La torréfaction est le moment clé où l’amertume s’intensifie. Un grain de café cru est relativement doux. C’est en le chauffant à plus de 200 °C qu’on libère ses arômes… et ses saveurs amères.

torréfaction légère :
Moins d’amertume, plus d’acidité, notes fruitées.

torréfaction moyenne :
Équilibre entre douceur, acidité et amertume.

torréfaction foncée :
Forte amertume, notes fumées et chocolatées.

[C’est pourquoi les cafés espresso, souvent torréfiés plus foncés, sont perçus comme plus amers.]

Image microscopique des récepteurs gustatifs de la langue (meb)

Infusion : trop d’extraction = trop d’amertume

Même avec un excellent café, une mauvaise technique d’extraction peut amplifier l’amertume. C’est ce qu’on appelle la surextraction.

Quand l’eau reste trop longtemps en contact avec le café moulu, elle extrait non seulement les arômes subtils, mais aussi les composés amers de fin de cycle, comme les phénylindanes.

Facteurs qui accentuent la sur-extraction :

a) Une mouture trop fine
b) Une température d’eau trop élevée (>96 °C)
c) Un temps d’infusion trop long
d) Une dose d’eau trop faible pour la quantité de café

Les méthodes comme la Chemex ou le Kalita, bien maîtrisées, permettent un meilleur contrôle de l’extraction et réduisent l’amertume indésirable.

Origine et variété : tous les cafés ne sont pas égaux

Certains grains de café sont naturellement plus amers que d’autres.

01   La variété :
Le
Robusta, par exemple, contient plus de caféine et moins de sucres naturels que l’Arabica. Il produit donc un café plus corsé (plus de corps) et plus amer.

02   L'altitude :
Les cafés de hautes altitudes, souvent plus riches en acides organiques, ont tendance à masquer l’amertume avec plus de complexité aromatique.

03   Traitements / procédés poste-récolte :
Il suffit d'un mauvais séchage, une fermentation bâclée ou un grain défectueux pour générer des arômes indésirables, dont l’amertume.

L’amertume bien maîtrisée : un outil sensoriel

L’amertume n’est pas toujours un défaut. Dans un café bien équilibré, elle apporte de la structure et de la profondeur. C’est ce qui fait le charme d’un espresso intense.

Les torréfacteurs spécialisés jouent avec l’amertume comme un chef joue avec l’amertume du cacao ou de l’endive : il s’agit de trouver l’équilibre juste entre douceur, acidité et amertume.

Conclusion : comprendre pour mieux savourer

Si votre café est trop amer, ce n’est pas forcément la faute du grain. Cela peut venir de la torréfaction, de l’infusion ou même de votre propre sensibilité gustative. En comprenant les mécanismes chimiques et sensoriels derrière cette saveur complexe, on peut apprendre à l’apprécier… ou à l’éviter selon ses préférences.

Chez Brûlerie du Quai, nous croyons que l’amertume est une nuance, pas une fatalité. Bien dosée, elle donne du caractère à votre tasse. Mal maîtrisée, elle gâche l’expérience.

Notre mission : vous offrir des cafés équilibrés, torréfiés avec précision, pour révéler le meilleur de chaque grain.

 

Marie-Claire Marquis
Chercheuse 



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