La quête de l'espresso - Volume I


Dany Marquis

 

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La Quête de l'Espresso - Volume 1

 

Le Saint-Graal du café. La ruée vers l’or !

Lors du dernier podcast, j’avais lancé l’idée de faire une rétrospective de l’année 2020 au niveau du café et un survol de l’industrie du chocolat. Mais durant le temps des fêtes, j’ai repris le flambeau des communications puisque ma collègue Maélie a pris des vacances méritées. 

Avec le développement de ma famille d’entreprise, j’ai l’impression parfois d’être toujours en survol, en haute altitude pour garder un œil sur toutes les opérations. 

Et sur toutes les facettes de ce que peut comprendre la gestion de plusieurs entreprises, je me réserve la position éditoriale du choix des importations et des sélections de café et de cacao, je m'occupe du contrôle qualité, et je me tiens très près de nos clients. 

C’est important pour moi et ça me donne un prétexte pour ne pas faire de comptabilité.

Ah Ah !

Bref, alors que je discutais avec des confrères de l’industrie, pour savoir ce qui les avait marqués en 2020, au Québec, et en France, nos médias sociaux de ne dérougissaient pas.

Je recevais une pléthore de questions sur l’espresso : la mouture, les types de grains, la méthode, des questions sur les équipements, etc. 

J’avais l’impression de lire des questions de gens qui avaient entendu qu’il y avait de l’or au Klondike et qui me demandait comment on s’y rend rendait, ce dont ils ont avaient besoin, comment on fait faisait pour trouver de l’or.

Mon mari m’a acheté un kit de prospecteur débutant au Costco, est-ce que c’est suffisant pour me rendre au Klondike ?

C’est mon travail principal d’accompagner mes clients dans cette quête. Ne pensez pas que toutes ces questions m’énervent, bien au contraire. Je prends ça très au sérieux et c’est notre travail de vous aider à trouver de l’or et à vous accompagner dans votre quête.

Alors au lieu de faire un épisode ennuyant, qui serait intéressant uniquement pour les gens de l’industrie, je vais lancer une série d’épisodes sur l’espresso.

Donc, on oublie la rétrospective de 2020. De toute façon, 2020, on la jette aux oubliettes.

Bref, je vais vous accompagner dans votre quête.

Et j’insiste sur le mot quête, car c’est vraiment comme ça qu’il faut le considérer.

Et si vous êtes près de nous, comme client, que vous avez lu mes blogs, écouté nos podcasts, vous verrez que j’ai une relation amour/haine avec l’espresso.

Je vous explique un peu pourquoi.

 

Ce n’est pas que je n’aime pas l’espresso. Au contraire, j’adore l’espresso, quand c’est bien fait. 

Pour moi, c’est comme la pâtisserie, il faut que ce soit précis, bien mesuré, bien taillé.

Lorsque la conjoncture parfaite des nombreux paramètres impliqués te sort une dose divine. Ou lorsque je visite un coffeeshop, il arrive parfois que je reçoive un bon espresso. Mais ça demeure extrêmement rare.

Et de mon côté, j’ai des équipements parmi les meilleurs au monde ; une La Marzocco Strada avec balance intégrée et les brew ratios calculés par la machine. Et une bouilloire séparée pour chaque groupe pour un total de 4 bouilloires. On utilise des paniers VST. On a des moulins Malkhonig Peak avec des meules de 80 mm, le moulin indique la température des meules en temps réel et utilise une double ventilation pour les refroidir au besoin. Mon équipe de barista est très compétente, comprend la matière et on suit les protocoles de préparations minutieusement.

Pour ce qui est du café, c’est moi qui sélectionne le café vert, et je joue un rôle actif dans notre comité de contrôle qualité.

Bref, je ne veux pas me vanter en disant ça, mais c’est pour vous brosser un portrait de mon environnement, et pour vous dire que parfois, le café n’est pas à la hauteur de mes attentes. Je suis très exigeant, mais je suis capable de dire qu’un espresso est acceptable, et également qu’il ne l’est pas.

Disons qu’il y a une marge d’erreur. 

Et c’est normal. Ça fait partie de la nature même de ce breuvage. 

Et c’est ce qui est magique, car une fois qu’on a gouté à un espresso parfait, on reste envouté.

Un peu comme un amour d’adolescence, le temps d’un été, comme dans la chanson « une belle histoire » de Michel Fuguain.

Une fois la tasse terminée, on ressentira une grande satisfaction, mais nous serons devant l’abime de la finalité.

Ce fut intense, court, magnifique.

Et pendant un certain temps, nous allons errer pour trouver la même chose. On finira même par idéaliser ce coup de foudre pour le rendre inaccessible à jamais.

En vain. Comme un vide qu’on ne pourra jamais combler.

Parfois, ce n’était pas seulement le contenu de la tasse qui était extraordinaire, mais la porcelaine de la tasse, le charisme du barista, le soleil sur la terrasse de l’hôtel, etc. 

Pas plus tard qu’hier, un client m’écrivait pour me partager sa recherche d’un café qui gouterait comme celui qu’il avait bu sur la terrasse de l’hôtel Do Pozzi à Venise. Je ne connaissais pas cet hôtel, je l’ai googlé, et ça l’air charmant. 

Peut-être que le café était extraordinaire, mais peut-être que l’environnement, la conjoncture des évènements, l’était tout autant. 

Un peu comme les pommes qu’on allait voler dans le petit verger de Mme Liette, la professeure de 3e année. Je n’ai jamais retrouvé de pommes aussi bonnes.

Ou l’espresso qu’on m’a servi à Gisenyi au Rwanda, sur la terrasse d’un petit restaurant après avoir passé la journée au bord du lac Kivu.

Ou celui de la petite succursale de Irish Town Café Blue, en Jamaïque, celui sur la route B1 qui mène au parc national des Blues Mountains. La terrasse a une vue complètement hallucinante. Dans ce cas, l’espresso était parfait. Mais probablement que mon jugement était altéré !

Bref, l’appréciation d’un espresso est donc la somme des paramètres très techniques de préparation, additionnés à un paquet de facteurs subjectifs qui baigne la consommation.

Avouez qu’il y a tout pour les romantiques comme moi.

Mais maintenant, ce qui me fâche avec l’espresso, c’est lorsque l’environnement et le contexte prennent le dessus et qu’on finit par accepter de boire certains espressos et dire que c’est bon lorsque ceux-ci ne sont plus dans le spectre de la marge d’erreur.

Et c’est à ce niveau que je crois que certains fabricants de café, et ceux qui servent le café exagèrent.

Ce qui est comprenable, car c’est très payant de vendre du mauvais café et de le faire passer pour un grand cru.

Pour moi, un espresso, ça devrait être proche d’un dessert. 

Un peu comme une mousse au chocolat et au café. Jamais un pâtissier ne va sortir une mousse qui goutera la cendre, le sucre carbonisé, le camphre, la guenille mouillée, etc.  J’en ai même déjà gouté qui me rappelait l’odeur d’une vieille moppe ou l’odeur du chien mouillé de ma vieille tante qui fumait comme une cheminée.

Dans mon esprit, un espresso, ça doit demeurer agréable à boire. Et ce, peu importe le contexte.

Et pourtant, si on se déplace du côté de la bière ou du vin, un mauvais breuvage ne fera pas long feu. Peu importe le sourire du fabricant, du serveur et de la décoration.

D’ailleurs, pour faire partie de quelques groupes de dégustation de bière, les vidéos de clients mécontents qui versent la bière dans leur évier de cuisine me font toujours sourire. Pas de pitié pour la piquette ! On devrait faire de même avec l’espresso.

Et de l’autre côté de l’Atlantique, en France, où on y apprend à déguster du vin à la maternelle. La France, berceau de la gastronomie mondiale, avec les grandes écoles, avec les grands chefs et la prestigieuse appellation MOF (meilleur ouvrier de France) on y boit majoritairement du café digne de la pire piquette. En disant que c’est délicieux.

Dans les arts culinaires, on retrouve certaines règles ; des troncs communs sur ce qui est bon, agréable, ce qui peut surprendre, mais reste dans la stimulation agréable des 5 sens.

On dirait que, dans le café, on s’est laissé convaincre que ce qui est mauvais est bon. 

On se croirait dans 1984 de Orwell, mais au lieu de demander ce que font 2 + 2, on demande si l’espresso est bon.

Dans le whisky par exemple, je peux comprendre que des notes très tourbé, un peu salé tirant sur le hareng fumé puisse déplaire, mais nous sommes encore dans un spectre du consommable et de l’expérientiel. 

Ça demeure bon, et c’est une question de gout personnel. 

Pourquoi dans l’espresso y a-t-il eu autant d’influence ? 

Pourquoi dans l’espresso, en est-on rendu à dire que 2+2=5 ?

Je crois que tout a commencé, un bon matin, quelque part, alors que deux personnes se retrouvent au comptoir d’un bar à café, face à un barista très fier de leur servir leur petite tasse.

Les deux individus prennent une gorgée simultanément, et le barista leur lance :

-          Et puis, c’est du bon, hein ?

Et là, à ce moment même, l’histoire du breuvage a basculé. 

À ce moment précis, l’espresso servi était mauvais, sous-extrait, d’un assemblage de café bon marché rempli de robusta au gout de caoutchouc que le patron avait déniché. 

C’est beaucoup plus payant ainsi.

Le café très gras a fait un crema épais et dense, mais avec un gout très amer. Tellement, que le barista suggère d’y mettre du sucre. Et devant le sucre qui flotte sur la couche de crema, le barista dira que c’est ainsi qu’on reconnait un bon café, vous savez lorsque le crema est tellement dense que le sucre prend une éternité avant de descendre. 

Les deux clients, habitués à d’autres références de gout, se sont fiés au fier barista, n’osant pas le contredire, et ont déposé sur le breuvage une bonne dose de sucre.

Une joute subtile d’influence, qui aurait fâché le barista.

Et la piquette est devenue la norme.

Je dois aussi préciser que l’espresso n’a pas été inventé pour la dégustation, mais pour la rapidité du service. Comment servir beaucoup de café en peu de temps. 

Voilà pourquoi on l’appelle l’expresse expresso. 

C’est donc l’équivalent du fast food. 

Parfois je me dis que c’est comme si on essayait à la maison de se faire un big mac. Et d’en reproduire la recette.

Certains voudront reproduire exactement la même expérience, d’autres l’amélioreront en fonction des standards de bon gout qu’on connait avec la science et les connaissances de l’art culinaire.

C’est un peu la même chose avec l’espresso. Avec le temps, le développement technique, la 3e vague, les méthodes de torréfaction moderne et scientifique, les producteurs qui font la meilleure qualité et qui la rendent accessible plus facilement, il est possible de faire un espresso délicieux.

De réinventer le big mac.

Bref, je vous invite à revoir l’espresso, et à être plus critique face à ce breuvage.

À ne pas hésiter à contredire le barista, à vous méfier de l’aura d’expert du vendeur de café, du vendeur de cafetières. 

De vous fier à votre gout.

Si c’est mauvais, c’est que c’est mauvais, tout simplement. Même si on vous le présente avec un accent italien, français, portugais, faites-vous confiance.

Et maintenant que la table est mise, je vais aborder dans les prochains segments, les aspects techniques qui vous permettront de comprendre cette méthode et de vous donner des outils et connaissances dans cette quête.

Parce que oui, j’aime l’espresso, quand c’est bien fait ça goute l’amour.

À +

Dany Marquis

Les volumes 2 et 3 de La Quête de l'espresso sont sortis !

Retrouvez les ici :

 


6 commentaires


  • Eustache Prud'homme

    Wow !! J’ai hâte de lire la suite


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